• Astronomie
  • Cosmologie

James Webb ouvre une nouvelle ère en images

Publié le 12 juillet 2022

Le télescope spatial James Webb est à pied d'œuvre et ses premières images, ainsi que sa première analyse spectrale, ont été révélées au monde entier.

James Webb ouvre une nouvelle ère en images

Toute la communauté scientifique internationale a des étoiles plein les yeux. L’attente a été longue, le lancement a été repoussée de huit ans, mais enfin les premières images « scientifiques » captées par les instruments du télescope spatial James Webb sont là, et elles révèlent une richesse de détails comme on en n’avait pas vu depuis près de trente ans, lorsque son prédécesseur, le télescope spatial Hubble, une fois sa vue corrigée, avait entamé sa longue carrière de découvertes.

La Nasa, l’Agence Spatiale Européenne (ESA), l’Agence Spatiale Canadienne et le Space Telescope Science Institute nous avaient promis cinq images, mais il y en a plus, car les quatre des cinq vues ont en fait été observés par chacun par plusieurs instruments, révélant les incroyables capacités du nouvel observatoire astronomique.

Des galaxies lointaines

Dévoilée, dès hier par la Maison Blanche, l’image du fond lointain autour de l’amas de galaxies SMACS 0723 n’a pris qu’une journée d’observation au James Webb alors qu’il aurait fallu des semaines à Hubble pour parvenir au même résultat. On y distingue des effets de lentille gravitationnelle, la masse de l’amas déviant la lumière venue des galaxies situées derrière lui, ce qui les fait apparaître comme comme des taches courbées.

James Webb SPACS 0723

L’amas de galaxies SPACS 0723 vu par les instruments MIRI (à g.) et NIRCam (à d.) du télescope spatial James Webb.

Ce que Joe Biden ne nous a pas montré c’est que ce même fond a été observé dans deux plages de l’infrarouge : infrarouge moyen par l’instrument euro-américain MIRI (Mid InfraRed Instrument) et proche infrarouge par l’instrument américain NIRCam (Near-InfraRed Camera).

Autre vue étonnante, celle du Quintet de Stephan, dans la constellation de Pégase. En réalité quatre de ces galaxies, qui interagissent et se déforment par effets de marées, sont situées à environ 340 millions d’années-lumière de notre Voie Lactée, tandis que la cinquième, dix fois plus proche, ne leur est associée que par le hasard de la perspective.

La première image, en proche et moyen infrarouge, est une mosaïque de constituée d’un millier d’images pour un total de plus de 150 mégapixels, et la structure interne de ces galaxies apparaît avec un niveau de détail inégalé.

James Webb Quintet de Stephan

Mosaïque d’images du Quintet de Stephan en proche et moyen infrarouge vue par le James Webb.

Une seconde mosaïque, à partir de vues prises par MIRI dans l’infrarouge moyen seul, permet de voir encore mieux les structures internes de ces galaxies à travers les nuages de poussières.

James Webb Quintet de Stephan

Le Quintet de Stephane en infrarouge moyen vu par l’instrument MIRI du James Webb.

Nébuleuses et pépinières d’étoiles

Plus près de nous, le James Webb a fait de nouveau la démonstration de la complémentarité des domaines couverts par ses instruments en les pointant sur la nébuleuse de l’Anneau austral, dans la constellation des Voiles. Cette nébuleuse planétaire – appelée ainsi car on pouvait confondre apparence avec celle d’une planète, est en réalité un nuage de gaz en expansion autour d’un couple d’étoiles, dont une est une naine blanche qui a expulsé ses couches externes et l’autre pourrait exploser à son tour, créant une nouvelle nébuleuse à l’intérieur de la première. Son diamètre fait presque une demi-année-lumière et elle se situe à environ 2 000 années-lumière.

Nébuleuse de l'anneau austral

La nébuleuse de l’anneau austral (NGC 3132).

À gauche, l’image de l’instrument NIRCam dans le proche infrarouge fait apparaître plus clairement les poussières et les gaz composant la nébuleuse, tandis qu’à droite la même vue par l’instrument MIRI dans l’infrarouge moyen permet de séparer les étoiles et de distinguer la structure interne de la nébuleuse. Dans des milliers d’années, ces couches gazeuses délicates se dissiperont dans l’espace environnant.

Autre nébuleuse majeure de l’hémisphère sud, la nébuleuse de la Carène, dans la constellation du même nom, est l’une des plus grandes et les plus brillantes du ciel. Située à environ 7 600 années-lumière il s’agit d’une pouponnière d’étoiles et pour la première fois, le télescope spatial James Webb nous permet de découvrir ses étoiles en cours de formation, cachées derrière ce qui ressemble à des falaises de poussières et de gaz.

Nébuleuse de la Carène James Webb

La nébuleuse de la Carène, une des plus importantes du ciel austral, dévoilée en détail par le télescope spatial James Webb.

Une seconde vue combinée des instruments NIRCam et MIRI de Webb permet de zoomer sur cette pépinière. Dans le proche infrarouge, nous voyons des centaines d’étoiles et de galaxies à l’arrière-plan, tandis que l’infrarouge moyen révèle des disques poussiéreux formant des planètes (en rouge et rose) autour de jeunes étoiles.

Nébuleuse de la Carène James Webb

Gros plan sur la pépinière d’étoiles et les disques protoplanétaires au sein de la nébuleuse de la Carène.

L’atmosphère d’une exoplanète

Toutes les observations de James Webb ne pourront être aussi spectaculaires et chamarrées que les premières images dévoilées ce 12 juillet. Les couleurs qui nous sont présentées ne sont là que pour traduire des images que nous ne pourrions percevoir, puisque nous ne voyons pas les infrarouges, en images que nous puissions appréhender.

Mais l’importance scientifique est évidente, comme en témoigne cette autre mesure révélée parmi les premiers résultats des observations du James Webb : l’analyse spectrale de la lumière venue d’une exoplanète, l’une des premières à avoir été découvertes en 2014, WASP-96b. Cette géante gazeuse, moitié moins massive que Jupiter, est située à près de 1 150 années-lumière de distance. Très proche de son étoile, elle accomplit sa révolution autour d’elle en à peine 3,4 jours.

Spectre WASP-96b James Webb

En décomposant la lumière venue de cette planète très chaude (plus de 1 000°C), il a été possible d’obtenir l’analyse spectrale la plus détaillée d’une exoplanète à ce jour. L’instrument canadien NIRISS (Near Infrared Imager and Slitless Spectrograph) a été capable de repérer sans ambiguïté la signature spectrale de l’eau, mais aussi des indications sur la présence de brume et même la preuve de l’existence de nuages alors que l’on pensait jusque là que cette exoplanète en était dépourvue.

Quelles autres surprises nous réservent les prochaines observations réalisées par le James Webb Space Telescope (JWST) ? Grâce à la précision de son injection sur orbite par Ariane 5 le 25 décembre dernier, nous aurons peut-être vingt ans de mission pour le découvrir.

Articles sur le même thème

La Cité de l’espace en ligne

Nos ressources et actualités spatiales