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Philae photographié par Rosetta

Publié le 05 septembre 2016

S’approchant à 2,7 km de la surface de la comète 67P, la sonde Rosetta de l’Agence Spatiale Européenne (ESA) a enfin pu photographier sans l’ombre d’un doute l’atterrisseur Philae, là où les ingénieurs pensaient qu’il s’était immobilisé le 12 novembre 2014.

Philae photographié par Rosetta

«L’Aventurière du Philae Perdu», tel pourrait être le titre d’un film d’aventures avec cette fois-ci la sonde Rosetta dans le rôle d’un Indiana Jones spatial et robotique à la recherche, non pas de l’arche d’alliance, mais de l’atterrisseur de 100 kg qui signa le premier posé sur une comète le 12 novembre 2014. Et derrière Rosetta se cache toute l’équipe de cette mission (ingénieurs, scientifiques, contrôleurs au sol, etc.) qui n’a jamais abandonné l’idée de dénicher où Philae avait bien pu s’immobiliser après son double rebond imprévu !

Rosetta - Philae

Philae sur 67P débusqué par Rosetta le 2 septembre 2016. On remarque le corps central du robot et ses jambes d’atterrissage dont une brillante grâce à l’éclairage du Soleil.
Crédit : ESA/Rosetta/MPS for OSIRIS Team MPS/UPD/LAM/IAA/SSO/INTA/UPM/DASP/IDA

Dans la vidéo du CNES ci-dessous, Phillipe Gaudon explique la découverte de Philae par Rosetta.

La quête pour Philae

Revenons un peu en arrière. Lancée le 2 mars 2004 par Ariane 5 depuis Kourou, Rosetta effectua un long périple de 10 ans avant de réussir son rendez-vous avec la comète 67P/Churyumov-Gerasimenko le 6 août 2014. Au lieu de survoler le noyau d’un astre chevelu, Rosetta devient la première sonde à se placer sur orbite autour. En plus de scruter 67P avec ses instruments, Rosetta largue le 12 novembre le robot Philae qui signe le premier atterrissage sur une comète. Ce jour-là, la Cité de l’espace de Toulouse avait accueilli plus de 6000 personnes venues suivre l’événement comme le montre le clip vidéo ci-dessous.

Cependant, l’arrivée ne se déroula pas comme prévu. Aussitôt parvenu au sol, Philae rebondit et parcourut ainsi plus d’un kilomètre avant de s’immobiliser. Hélas, l’engin se trouva à l’ombre et dans l’incapacité de recharger ses batteries. Au Centre Spatial de Toulouse du CNES (l’agence spatiale française), les équipes du SONC (Space Operations and Navigation Centre), sous la direction de Philippe Gaudon, ont reprogrammé le robot afin qu’il utilise au maximum ses instruments avant de cesser de fonctionner.
Dans la vidéo ci-dessous, Philippe Gaudon raconte cette course contre la montre devant une maquette grandeur nature de Philae qui était alors exposée à la Cité de l’espace.

En analysant différentes données, ingénieurs et scientifiques calculèrent les endroits les plus probables où pouvait bien se trouver Philae. Rosetta prit des clichés des zones concernées, mais étant à une vingtaine de km de distance du noyau, la résolution ne permettait pas de trancher.

Rosetta - Philae

Cette comparaison de clichés réalisés par Rosetta avant l’atterrissage de Philae (à gauche, le 22 octobre 2014) et après (12 et 13 décembre 2014) montre un «objet» brillant qui semble être «arrivé» entre octobre et décembre. Il s’agissait du candidat le plus sérieux pour situer Philae mais la résolution ne permettait pas d’en être certain à l’époque.
Crédit : ESA/Rosetta/MPS for OSIRIS Team MPS/UPD/LAM/IAA/SSO/INTA/UPM/DASP/IDA

Trouver Philae : un enjeu scientifique

Les choses ont récemment changé, car Rosetta doit achever sa mission par un crash contrôlé le 30 septembre prochain. De fait, la sonde navigue en ce moment de plus en plus près de 67P en préparation de cet événement. Et le 2 septembre, passant à seulement 2,7 km de la surface du noyau cométaire, la caméra haute résolution OSIRIS de Rosetta a saisi la région qui semblait être la plus probable. Succès : avec une résolution de 5 cm/pixel, la forme de Philae, qui a à peu près la taille d’une machine à laver, apparaît clairement et il n’y a cette fois-ci plus de doute.
La position de Philae par rapport à la surface de la comète explique aussi pourquoi il fut quasiment impossible de rétablir les communications malgré deux brefs signaux radio perçus par Rosetta en juin et juillet 2015.

Rosetta - Philae

Le cliché de la caméra OSIRIS de Rosetta du 2 septembre 2016 montre de façon éclatante Philae sur le petit lobe de 67P, là où ingénieurs et scientifiques pensaient le plus probable qu’il soit arrivé.
Crédit : ESA/Rosetta/MPS for OSIRIS Team MPS/UPD/LAM/IAA/SSO/INTA/UPM/DASP/IDA

Trouver Philae n’est toutefois pas qu’une satisfaction liée à la curiosité : elle a son utilité scientifique. En effet, après s’être immobilisé, Philae a accompli de nombreuses mesures. Mais ayant rebondi, il n’était plus à l’endroit visé. Du coup, privés de l’information de son emplacement, les scientifiques ne pouvaient pas avec certitude situer où les instruments avaient travaillé. Le noyau de 67P étant un environnement complexe et varié, cette précision était pourtant essentielle. Elle est désormais validée grâce à Rosetta. Comme le résume Matt Taylor, le responsable scientifique de Rosetta à l’ESA, on peut ainsi «mettre les 3 jours de science de Philae dans leur contexte correct maintenant qu’on sait où il est».

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