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Humanity : le jeu qui vous emmène sur Titan

Publié le 14 novembre 2023

Le jeu de société Humanity vous place à la tête d’une base scientifique sur Titan en 2073. Un titre qui bénéficie d’une préface par le responsable de la mission européenne Huygens qui s’est posée sur cette lune de Saturne en 2005.

Humanity : le jeu qui vous emmène sur Titan

Comme nous l’avons précédemment évoqué, le spatial est une thématique en vogue au sein des jeux de société. En cette fin d’année, Bombyx propose Humanity qui a pour cadre l’installation sur Titan de bases scientifiques. La maison d’édition bretonne a répondu à nos questions sur les choix qu’elle a opérés sur ce titre.

Sur Titan pour la science

S’inspirant des tendances actuelles du spatial et du phénomène du New Space, beaucoup de jeux récents envisagent un futur où des corporations privées exploitent la Lune (Skymines), celles de Jupiter (Galileo Project) ou carrément terraforment Mars (Terraforming Mars, ces trois jeux sont présentés ici). En revanche, pour Humanity, Bombyx a préféré une exploration spatiale où c’est la science qui prime. Joueurs et joueuses gèrent donc chacun une base habitée qui a pour but de mener des expériences scientifiques sur Titan. Laura Rouquié, assistante d’édition chez Bombyx, explique ainsi ce choix : «La thématique spatiale étant assez courante, nous voulions réfléchir à un angle un peu original. Nous ne voulions pas faire de la SF. Nous avons opté pour une approche réaliste». Une démarche à laquelle adhère complètement l’auteur du jeu, Yoann Levet : «J’ai tout de suite été très emballé par le choix de ce thème spatial. Mon meilleur film de tous les temps est Interstellar donc je me suis très rapidement imprégné de cet univers».

Le matériel du jeu Humanity. Il permet à chaque joueur ou joueuse de gérer sa base sur Titan et de l’agrandir afin notamment de faire progresser la science.
© Bombyx

De fait, il n’y a pas d’extraterrestres belliqueux dans Humanity ou de téléportation. L’univers fictionnel présenté pousse les curseurs de la technologie astronautique et imagine qu’une International Space Agency (ISA) a mis sur pied une exploration habitée de la plus grande lune de Saturne qui s’appuie sur une station sur orbite, la Titanian Gateway, et des infrastructures au sol. Un schéma qui rappelle au passage celui de l’actuel programme Artemis de retour sur la Lune (celle de la Terre !) qui réunit les agences spatiales américaine, européenne, japonaise et canadienne (ce retour et le programme Artemis sont expliqués au sein de Lune – Épisode II à la Cité de l’espace de Toulouse et avec la nouvelle expérience immersive LuneXplorer ).

Ci-contre, bande-annonce en vidéo du jeu Humanity de Yoann Levet édité par Bombyx.

Quelques clins d’œil d’Humanity au spatial réel. En haut à gauche, un de modules qu’on peut ajouter à sa base sur Titan dans le jeu est une serre. Les agences travaillent beaucoup sur la notion de «potager spatial» afin de donner la possibilité aux astronautes en mission de cultiver des légumes ou fruits frais (un apport nutritionnel important et un facteur d’autonomie).
En haut à droite, on remarque que certaines tuiles du jeu sont visuellement similaires aux véhicules Crawler de la NASA construits lors d’Apollo et chargés d’amener les fusées Saturn V vers leur pas de tir, puis les navettes spatiales et désormais le lanceur SLS du programme Artemis.
En bas, les figurines d’astronautes tiennent en main un outil inspiré par le Pistol Grip Tool, sorte de perceuse visseuse-dévisseuse Hi-Tech de la NASA. On voit en exemple Thomas Pesquet ainsi équipé au cours d’une sortie extravéhiculaire pendant sa deuxième mission Alpha.
© Cité de l’espace/Bombyx/ESA/NASA

Clins d’œil au spatial

Même si la date avancée dans le livret de règles (2073) paraîtra très optimiste pour l’établissement de bases habitées sur Titan, le jeu multiplie les clins d’œil au spatial actuel. On notera tout d’abord le fait que le livre contenant les règles (et présentant l’univers d’anticipation du jeu) est carrément préfacé par Jean-Pierre Lebreton, le responsable scientifique de la mission Huygens de l’Agence Spatiale Européenne (ESA). Il s’agissait d’un module largué par la sonde américaine Cassini et qui se posa sur Titan en janvier 2005. L’Europe signa ainsi l’atterrissage le plus lointain dans le Système solaire. Les couleurs employées pour Humanity, et bien sûr celles du sol de Titan, sont directement inspirées des images envoyées par l’atterrisseur Huygens. Dans l’illustration ci-contre, nous présentons quelques exemples de clins d’œil au spatial.

On notera aussi que la mécanique du jeu repose en grande partie sur l’ISRU, l’In-Situ Resource Utilization, à savoir l’utilisation des ressources locales, une logique sur laquelle travaillent les agences impliquées dans le programme lunaire Artemis. Par exemple, si on parvient à extraire de la glace d’eau sur la Lune, de futures installations habitées seront autonomes (ou partiellement autonomes) en eau de même qu’en oxygène et hydrogène (pour respirer ou pour obtenir du carburant). Dans Humanity, les ressources pour gérer sa base sont donc extraites de Titan (glace et méthane). Les modules additionnels ajoutés pendant une partie viennent thématiquement d’une usine automatique employant l’impression 3D. Or, la NASA et l’ESA travaillent déjà sur cette technologie pour l’avenir. L’exposition Lune – Episode II de la Cité de l’espace montre à ce titre un élément de construction imprimé en 3D à partir d’un analogue de poussière lunaire. Les habitats lunaires de demain seront probablement assemblés à partir des ressources de notre satellite naturel.

 Tout ceci exigera une logistique pensée avec anticipation et on retrouve cet aspect dans Humanity, car pour l’emporter, il faut gérer avec justesse les ressources dont on dispose afin de bâtir la base la plus efficace !

Cette proximité avec le spatial s’explique aussi par les centres d’intérêt d’Erwan Hascoët, le président de Bombyx : «J’ai une curiosité latente pour l’exploration spatiale et l’astronomie en général. Je lis régulièrement des magazines et regarde des reportages, mais mon télescope prend la poussière et je reste un grand néophyte». L’éditeur breton a du coup multiplié les recherches, reconnaissant que «la phase de recherche est sans doute la plus chronophage, mais aussi la plus exaltante». Phase complétée par un appel à des spécialistes du sujet. Laura Rouquié souligne avoir «reçu l’aide précieuse de Marie Ange du magazine Espace & Exploration pour relire tout cela et en vérifier la crédibilité».

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