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Ariane 5 : un lanceur précis

Un lanceur est souvent présenté par ses dimensions, ses performances, sa fiabilité et éventuellement son tarif. Mais un autre critère intéresse aussi ses clients potentiels : la précision.

Le 5 juillet, Ariane 5 décollait pour son dernier vol. Une ultime occasion pour de nombreux médias de mettre en valeur la fiabilité du lanceur européen. Quand on parle lanceur, on entend en effet surtout des chiffres liés à la masse totale au décollage et à la performance mesurée en charge utile délivrée sur telle ou telle orbite. Ariane 5 n’y échappe pas, souvent caractérisée par ses 780 tonnes à l’envol, sa capacité à placer 10 tonnes sur orbite de transfert géostationnaire (enjeu commercial majeur en ce qui concerne les satellites de télécommunications) et la fiabilité de ses lancements.

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Le télescope spatial Webb largué pile sur la meilleure trajectoire possible par Ariane 5 le 25 décembre 2021.

@ESA/Arianespace

Et Ariane 5 “offrit” 10 ans de plus au Webb

La précision d’Ariane 5 a permis d’économiser les ergols du télescope spatial James Webb

Pourtant, dans ce monde fait de force brute, la finesse a sa place ! Outre sa fiabilité, Ariane 5 offrait aussi une belle précision de livraison sur la trajectoire désirée. Un facteur important, car toute déviation doit être compensée par le « passager » avec sa propre propulsion, ce qui implique une consommation de carburant et donc une diminution de sa durée de vie opérationnelle. Pour être concret, prenons le spectaculaire exemple du James Webb Space Telescope dans lequel la NASA a investi 10 milliards de dollars. Au titre de la participation de l’Agence Spatiale Européenne (ESA), l’envoi de cet observatoire spatial de 6,5 m de diamètre a été confié à Ariane 5, chargée de le larguer sur une trajectoire lui permettant de rejoindre son orbite opérationnelle autour du point de Lagrange L2 à 1,5 million de kilomètres de la Terre. Le 25 décembre 2021, la précision fut telle que le Webb économisa énormément de son carburant, lui donnant 10 ans de vie en plus, soit 20 au total. Ce fut confirmé par l’administrateur de la NASA Bill Nelson en personne lors d’une visite du site Les Mureaux d’ArianeGroup (constructeur d’Ariane 5) le 22 juillet 2022.

Quand Ariane peinait à convaincre

Le programme Ariane n’a pas toujours été pris au sérieux

Pour beaucoup l’objectif du programme Ariane n’était que  de faire un « lanceur de dissuasion » en vue de forcer les Américains à assouplir leurs conditions. Yves Sillard, (1936-2023) ancien directeur général de l’agence spatiale française CNES, évoquait en interview que, chaque année, le ministère français du budget voulait stopper Ariane
En 1979, il reçut toutefois de la part du gouvernement français de vives critiques, car les mesures de sécurité au Centre Spatial Guyanais furent estimées insuffisantes : les politiques craignaient un sabotage ! Yves Sillard accueillit ces remontrances avec joie puisqu’elles montraient que l’État soutenait enfin concrètement Ariane en lui consacrant plus d’argent pour la préserver de menaces extérieures éventuelles. Après tout, on ne protège que les choses auxquelles on tient vraiment.

Décollage inaugural d’Ariane 1 le 24 décembre 1979.
@CNES

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