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Fuite d’air dans l’ISS : Russes et américains en désaccord sur sa gravité

Publié le 15 novembre 2024

Depuis quatre ans, une fuite d'air dans le module russe Zvezda de l'ISS inquiète. Les Américains redoutent un risque de défaillance catastrophique, tandis que Roscosmos minimise la menace. En attendant, une réparation, l’équipage ferme le sas de Zvezda pour limiter les risques.

Fuite d’air dans l’ISS : Russes et américains en désaccord sur sa gravité

C’est une petite fuite d’air qui pourrait avoir de graves conséquences. Depuis 2019, une fuite d’air persistante dans le module Zvezda de la Station spatiale internationale est devenue un sujet de préoccupation. Ce problème est une source de tensions entre la NASA et Roscosmos, les deux agences n’étant pas d’accord sur la gravité de la situation et sa cause profonde. Les américains redoutent notamment que cette fuite d’air dans l’ISS ne mette en péril la structure même du module russe, placé sur orbite en 2000.

La toute jeune Station spatiale internationale photographiée ici depuis la navette Atlantis (STS-106) le premier septembre 2000. Zvezda est ici le module qui comporte les plus grand panneaux solaires.

© NASA

Une “étoile” en orbite depuis 2000

Zvezda est le troisième module à avoir rejoint l’ISS après Zarya et Unity

Zvezda, signifie « étoile » en russe. C’est un module essentiel de la Station spatiale internationale tant par son histoire que par sa fonction. Lancé en juillet 2000, il a été le troisième module à rejoindre l’ISS et le premier élément habitable du segment russe. Initialement, il a été conçu pour être le cœur de la station spatiale Mir-2 avant de participer au projet de l’ISS. Le 26 juillet 2000, il s’est amarré à Zarya. Le module américain Unity s’était déjà amarré à Zarya quelques mois plus tôt. Zvezda, est à la fois un module de service et d’habitation. En effet, il fournit des systèmes essentiels à la vie, mais aussi des quartiers d’habitation pour deux membres d’équipage. Enfin, il sert de centre structurel et fonctionnel du segment orbital russe. Le module peut accueillir jusqu’à six membres d’équipage, y compris des dortoirs séparés pour deux astronautes à la fois. Il dispose d’un tapis roulant fourni par la NASA pour les séances de sport, et d’une cuisine équipée.

Une fuite d’air préoccupante

Jusqu’à 1,7 kg d’air s’échappent quotidiennement de l’ISS à cause des fuites du module Zvezda

 

Depuis 2019, une fuite d’air persistante a été constatée dans l’ISS. Elle se situe dans un vestibule appelé PrK. Cet élément de Zvezda sépare le port d’amarrage où peuvent être installé des cargos de ravitaillement Progress ou des Soyouz habités et le reste du module. En février dernier, cette fuite a doublé. Elle a atteint jusqu’à 1,7 kg d’air par jour. Difficile d’identifier la cause de cette fuite même si l’hypothèse privilégiée reste celle de problèmes de soudure interne ou externe. C’est ce que concluait en septembre dernier l’Inspecteur général de la NASA. Des tentatives de colmatage ont été réalisées. Ces réparations seraient parvenues à réduire seulement d’un tiers la quantité d’air qui s’échappe.

PrK_Zvezda

Le PrK est cette partie beige située à l’arrière du module Zvezda. Il est une sorte de vestibule entre le vaisseau-cargo Progress qui peut s’amarrer de ce côté et le reste du module et donc de la station.

© Roscosmos

Sunita Williams en 2006, s’entraîne sur le tapis de course Treadmill Vibration Isolation (TVIS) installé dans le module Zvezda et fourni par la NASA.

© NASA 

Pas si grave ?

La NASA et Roscomos s’opposent sur la gravité de la fuite d’air dans ce module de l’ISS

Mais ce qui divise les Russes des Américains, ce sont les conséquences d’une telle fuite d’air sur l’avenir de l’ISS. En effet, la NASA n’hésite pas à parler d’un risque de « défaillance catastrophique » du PrK, remettant en question l’intégrité structurelle du module. En clair, comme un ballon de baudruche, le module serait susceptible d’exploser générant des débris et des éléments mettant en péril toute la station. Roscosmos, en revanche, minimise les inquiétudes et estime que la désintégration catastrophique du PrK est irréaliste. Une divergence d’opinion sur la gravité de la situation qui crée des tensions entre les agences.

“Pas toute jeune”

« La station n’est pas toute jeune. Elle existe depuis un bon bout de temps. On s’attend à une certaine usure, et c’est ce que nous constatons », a commenté l’astronaute américain Mickaël Barrat fraîchement revenu de son séjour de huit mois dans la Station spatiale internationale. Il a notamment raconté que l’équipage a pris l’habitude de fermer le sas du PrK, par précaution. « Ce n’est pas confortable, mais c’est le meilleur accord entre toutes les personnes intelligentes des deux côtés, et c’est quelque chose avec lequel nous vivons en tant qu’équipage », a-t-il indiqué très diplomatiquement. La NASA et Roscosmos indiquent qu’ils vont faire appel à des experts extérieurs pour les aider à évaluer les risques et à trouver des solutions pour colmater les fuites.

Nauka le module russe qui a fait faire un looping à l’ISS

En 2021, l’arrivée du module russe Nauka avait donné quelques ueurs froides à Thomas Pesquet

Ce n’est pas la première fois que les modules russes sont sources d’inquiétudes. En 2021, alors que Thomas Pesquet est commandant de l’ISS, Roscomos choisit d’installer le nouveau module Nauka. Dans son livre, l’astronaute français raconte que tous les membres d’équipage, à l’exception des Russes, avaient reçu l’ordre de se mettre en sécurité dans leurs capsules respectives pour un départ précipité en cas de défaillance. La NASA redoutait sérieusement un incident. Juste après l’amarrage, les propulseurs de Nauka s’étaient mis en route. L’ISS avait réalisé un demi-tour complet. L’incident n’a toute fois pas mis l’équipage en danger et quelques heures plus tard l’astronaute français avait réalisé une vidéo de présentation du nouveau module.

Le module Nauka a rejoint l’ISS en juillet 2021. ©NASA

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