• Histoire

Disparition de Thomas Stafford

Publié le 18 mars 2024

Sélectionné par la NASA en 1962, Thomas Stafford a participé à 4 missions, dont une autour de la Lune et une dernière qui marqua le premier rendez-vous entre Américains et Soviétiques. Il nous a quittés le 18 mars 2024 à 93 ans.

Disparition de Thomas Stafford

«Ceux qui ont eu le privilège de le connaître sont tristes, mais reconnaissants d’avoir connu un géant». C’est avec ces mots que l’administrateur de la NASA Bill Nelson a salué la mémoire de Thomas Stafford le jour du décès de ce dernier le 18 mars 2024. Né le 17 septembre 1930 à Weatherford dans l’Oklahoma, ce pilote d’essai de l’US Air Force qui a cumulé 21 jours dans l’espace en 4 missions a en effet activement participé aux grandes heures de l’agence américaine dans le cadre de la course à la Lune.

Un alligator en colère

Thomas Patten Stafford est sélectionné par la NASA en 1962, soit lors de la deuxième campagne de recrutement d’astronautes de l’agence. À l’époque notre satellite naturel s’impose comme l’objectif majeur en raison de la course engagée avec l’Union soviétique.
Le pilote d’essai venu de l’US Air Force effectue tout d’abord deux missions du programme Gemini qui repose sur le premier vaisseau biplace américain. Tout en restant sur orbite terrestre, Gemini sert à mettre au point les technologies nécessaires pour la Lune. Avec Gemini VI-A en décembre 1965, Thomas Stafford et son commandant Walter Schirra signent le premier rendez-vous orbital habité rapproché en se postant à quelques dizaines de centimètres de Gemini VII (Frank Borman et James Lovell). L’année suivante en juin 1966, Stafford commande Gemini IX avec Gene Cernan comme pilote. Ils doivent s’amarrer à un étage supérieur de fusée qui sert de cible. Mais la coiffe de celui-ci est restée attachée et partiellement ouverte lui donnant l’allure d’un «alligator en colère» selon les propres mots de Thomas Stafford.

La mission Gemini IX commandée par Thomas Stafford en 1966 devait s’amarrer à cette cible. En raison de la coiffe restée attachée et ouverte en partie, l’astronaute la qualifia d’«alligator en colère».
© NASA via Wikiarchives.space

L’équipage d’Apollo 10, de gauche à droite : Gene Cernan, John Young et Thomas Stafford.
© NASA via Wikiarchives.space

Apollo 10 : l’indispensable répétition

Apollo s’appuie ensuite sur les briques technologiques validées par Gemini. Thomas Stafford continue son travail de préparation à l’arrivée sur notre voisine céleste en commandant Apollo 10 en mai 1969 qui répète toutes les manœuvres nécessaires, à l’exception de l’alunissage. Tandis que John Young est resté à bord de la capsule Apollo Chartie Brown, avec Gene Cernan, Stafford fait descendre le Module Lunaire Snoopy jusqu’à 14,4 km de la surface sélène. Les deux astronautes testent même la procédure d’urgence qui consiste à larguer l’étage inférieur du Module Lunaire et sont confrontés à une mise en rotation anarchique du vaisseau. Fort heureusement, ils parviennent à reprendre en main la situation in extremis. L’origine du problème sera identifiée : Cernan et Stafford, en appliquant la procédure avaient chacun de leur côté basculé un interrupteur, le ramenant dans la mauvaise position.
Le succès d’Apollo 10 ouvre alors la voie à l’historique Apollo 11 au mois de juillet suivant.
Thomas Stafford fait ainsi partie des 12 personnes qui ont tourné autour de la Lune sans y poser le pied (ses compagnons d’Apollo 10 John Young et Gene Cernan y marcheront avec respectivement Apollo 16 et 17).

Diplomatie dans l’espace

Le quatrième et dernier vol spatial de Stafford se déroule toujours sous la bannière du nom d’Apollo, mais la mission reste cette fois-ci autour de la Terre. Surtout, elle s’opère dans un cadre diplomatique marqué par la détente voulue au sein de la Guerre froide. Il s’agit en effet de réaliser le premier rendez-vous spatial entre deux engins de pays différents, à savoir une capsule Apollo américaine et un Soyouz soviétique. Pour Apollo-Soyouz Test Project, les astronautes de la NASA vont s’entraîner en Russie à la Cité des Étoiles en banlieue de Moscou. Réciproquement, les cosmonautes viennent aux États-Unis, à Houston et au centre Kennedy en Floride.
Le 17 juillet 1975, l’Apollo CSM-111 et le Soyouz 7K-TM n°75 se rejoignent. Les commandants des deux engins, Thomas Stafford et Alexei Leonov (premier homme à avoir accompli une sortie en scaphandre en 1965) se serrent la main trois heures plus tard. 

Pendant la mission Apollo-Soyouz de 1975, Thomas Stafford (à gauche) visite le Soyouz soviétique, accompagné par le commandant Alexei Leonov (à droite).
© NASA via Wikiarchives.space

Pendant 44 heures, les deux équipages (avec aussi Vance Brand et Deke Slayton côté américain et Valery Kubasov coté soviétique) visitent les vaisseaux, conduisent des expériences ensemble et partagent des repas.

Cette mission a probablement jeté les bases d’une coordination qui permettra plus tard les missions entre les navettes de la NASA et la station Mir, puis le principe de la Station Spatiale Internationale (ISS). D’ailleurs, Thomas Stafford était toujours au moment de son décès le président du NASA Advisory Council Task Force for ISS Safety and Operational Readiness qui supervise la sécurité du complexe orbital.
Très proche d’Alexei Leonov, Stafford avait prononcé l’éloge funèbre du premier marcheur de l’espace en 2019. Leonov était le parrain du plus jeune fils de Stafford.

stafford-leonov

En 2015, à l’occasion des 40 ans de la mission Apollo-Soyouz, Thomas Stafford (à gauche) et Alexei Leonov (à droite) s’étaient retrouvés à la Cité des Etoiles (officiellement le Centre d’Entraînement Youri Gagarine) en banlieue de Moscou.
© GCTC

Vidéo de la NASA retraçant la carrière de Thomas Stafford.

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