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Des morceaux de Vesta sur Bennu ?

Publié le 29 septembre 2020

En cartographiant la surface de l’astéroïde Bennu, la sonde OSIRIS-REx a repéré six rochers plus brillants que les autres. Les données indiquent qu’ils pourraient provenir d’un autre astéroïde, bien plus grand et plus lointain, Vesta.

Des morceaux de Vesta sur Bennu ?

Depuis la fin de l’année 2018, OSIRIS-REx scrute Bennu. Cette mission de la NASA doit le 20 octobre prochain prélever des échantillons à la surface de cet astéroïde de 500 m de large. Le feu vert pour cette délicate opération a été donné après une répétition réussie menée au mois d’août.
En attendant ce grand jour, les scientifiques examinent les données accumulées par la sonde afin de cartographier ce géocroiseur, c’est-à-dire un objet dont l’orbite recoupe celle de la Terre (Bennu ne présente toutefois aucun risque de collision). Et ils se sont penchés sur 6 rochers plus brillants que les autres.

Du Vesta sur Bennu : la solution

Ce sont des clichés de la surface de Bennu pris durant l’été 2019 qui ont attiré l’attention des spécialistes des astéroïdes. Se distinguent en effet 6 rochers de 1,5 à 4,3 m de large différents des autres, car plus brillants. Certains sont même 10 fois plus brillants que ce qui les entoure. Les données de la caméra OCAMS de la sonde et de son spectromètre infrarouge OVIRS indiquent que ces rochers contiennent des minéraux de la famille des pyroxènes. Or, de tels minéraux se forment à de hautes températures, suffisamment importantes pour que le matériau rocheux d’origine fonde.
Le problème ? Cela ne correspond pas à l’histoire de Bennu…

Deux clichés de la surface de Bennu par la sonde OSIRIS-REx qui montrent des rochers plus brillants probablement venus d’un autre astéroïde, Vesta. Crédit : NASA/Goddard/University of Arizona

Deux clichés de la surface de Bennu par la sonde OSIRIS-REx qui montrent des rochers plus brillants probablement venus d’un autre astéroïde, Vesta.
Crédit : NASA/Goddard/University of Arizona

Cette apparente contradiction a poussé une équipe menée par Daniella DellaGiustina de l’University of Arizona et Hannah Kaplan du centre Goddard de la NASA à examiner les hypothèses possibles. Bennu est essentiellement composé de roches hydratées, ce qui s’oppose à l’exposition à de fortes chaleurs (typiques du pyroxène)  pour son origine. On pourrait penser à une forte température plus localisée et générée par un impact. Mais celui-ci aurait détruit Bennu.
La solution avancée par Daniella DellaGiustina  et Hannah Kaplan fait appel à Vesta, le deuxième plus gros objet de la ceinture d’astéroïdes (après la planète naine Cérès) entre Mars et Jupiter. Voici 2 milliards d’années, l’astéroïde de 560 km de large aujourd’hui a subi un énorme impact. Puis un autre 1 milliard d’années après. À chaque fois, Vesta a perdu des morceaux importants (jusqu’à 10 km de large) qu’on appelle vestoïdes. L’un de ceux-ci a alors percuté un autre astéroïde en y laissant quelques fragments. Et cet astéroïde est le «parent» de Bennu, celui que les scientifiques soupçonnent d’avoir été disloqué (pas forcément par l’impact avec le vestoïde) et dont certains morceaux errants, dont les rochers issus du vestoïde, se sont agglomérés pour former Bennu.

Les astéroïdes Bennu (à gauche) et Vesta (à droite). Attention, les deux objets n’ont pas la même taille. Bennu fait un peu moins de 500 m de large alors que Vesta fait au plus 560 km de large (1000 fois plus). Crédit : JPL/NASA/Cité de l’espace

Les astéroïdes Bennu (à gauche) et Vesta (à droite). Attention, les deux objets n’ont pas la même taille. Bennu fait un peu moins de 500 m de large alors que Vesta fait au plus 560 km de large (1000 fois plus).
Crédit : JPL/NASA/Cité de l’espace

Par la suite, Bennu a migré de la ceinture entre Mars et Jupiter vers une orbite proche de la Terre par un mécanisme gravitationnel connu qui s’applique à d’autres objets similaires.
Ainsi, quelques rochers brillants permettent de reconstituer la parfois tumultueuse histoire des astéroïdes !
Pour cette étude publiée dans la revue de référence Nature, les auteurs ont souligné la participation significative de l’agence spatiale française CNES et de la Japan Society for the Promotion of Science.
La vidéo NASA ci-dessous résume cette découverte.

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