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Spatial : perspectives 2024

Publié le 08 décembre 2023

Alors que 2023 touche à sa fin, plusieurs tendances se dessinent pour l’année suivante avec de nouveaux lanceurs comme Ariane 6, les 144 missions visées par SpaceX, la continuation des vols habités privés et toujours le renouveau lunaire.

Spatial : perspectives 2024

L’exercice qui consiste à détailler ce qui doit se dérouler l’année prochaine est périlleux. En ce qui concerne le spatial, on sait par exemple que les dates de lancement sont toujours sujettes à des ajustements, ne serait-ce qu’en raison des caprices de la météo.
Dans cet article, il ne s’agit donc pas vraiment de prévoir ce que 2024 nous réserve du côté de l’astronautique, mais de dégager quelques tendances.

Photo en guise d’illustration du titre ci-dessus : la Lune en phase gibbeuse photographiée depuis la Station Spatiale Internationale le 30 novembre. © NASA

Lanceurs : une année chargée

144 vols pour SpaceX ?

Avec déjà plus de 80 vols au début de décembre 2023, la firme SpaceX a confirmé son impressionnante montée en cadence (après une soixantaine en 2022), se basant surtout sur son Falcon 9 dont le premier étage est réutilisable et parfois la version lourde Falcon Heavy. La firme fondée par Elon Musk ambitionne même 144 vols pour 2024. SpaceX compte aussi voir jusqu’où va la réutilisation du premier étage de son Falcon 9, envisageant une certification pour 20 à 30 lancements. Parallèlement, la société dont le siège social est à Hawthorne en Californie sera surveillée de près pour ses activités de Boca Chica au Texas, là où elle mène les vols d’essai de son énorme Starship dont une version spécifique doit servir d’atterrisseur lunaire pour le programme Artemis de la NASA. Le Government Accountability Office (GAO) des États-Unis a toutefois déjà prévenu que, selon lui, la mission Artemis III ne pourrait pas se dérouler comme envisagé en 2025.

Retour au sol d’un premier étage de Falcon 9 de SpaceX (sa hauteur est de 50 m).
© SpaceX

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Cet exemplaire d’Ariane 6 au CSG est destiné à des tests au sol. Ce sera un autre exemplaire (le FM1 pour Flight Model 1) qui accomplira le vol inaugural.
©ESA/CNES

Ariane 6 et Vega au CSG

Au Centre Spatial Guyanais (CSG), le port spatial de l’Europe, le grand événement sera très probablement le vol inaugural d’Ariane 6 annoncé comme devant se dérouler entre le 15 juin et le 31 juillet. Un deuxième vol du nouveau lanceur européen pourrait intervenir avant la fin 2024. Une troisième mission à partir vers l’espace depuis le CSG serait alors le dernier vol du petit lanceur Vega (version d’origine). Toutefois, plusieurs médias ont fait état de la destruction par erreur de réservoirs du dernier étage AVUM destiné à cet ultime vol. Enfin, si le retour en vol de la version plus puissante Vega-C (après l’échec de VV22 en décembre 2022) a été annoncé pour la fin 2024, des tests au sol restent à accomplir (et réussir) avant.
En Europe, on surveillera aussi les avancées de plusieurs start-ups qui développent des petits lanceurs dont certains visent une exploitation depuis le CSG.

Premières en vue

Le nouveau lanceur Vulcan de la firme américaine United Launch Alliance devait décoller avant la fin du mois de décembre 2023, mais sa mission inaugurale a été reportée au début du mois de janvier (et c’est un succès). 2024 sera donc l’année de sa mise en service puis celle de la montée progressive en puissance de son exploitation.

Vulcan a de plus été retenu par Sierra Space pour faire décoller vers l’ISS son petit avion spatial automatique Dream Chaser dans le cadre d’un contrat de prestation cargo avec la NASA. Le créneau visé pour cette première est le début 2024, si possible avant mai.

ULA utilisera en revanche son lanceur de référence actuel, l’Atlas V (dans une version spécifique N22) pour envoyer vers l’ISS la capsule Starliner de Boeing pour son premier vol habité (Barry Wilmore et Sunita Williams). Cet événement (il s’agit du deuxième vaisseau habité sous contrat avec la NASA dans le cadre du Commercial Crew Program, le premier étant la capsule Crew Dragon de SpaceX) est pour le moment prévu au mois d’avril.
Toujours aux États-Unis, on verra si 2024 sera l’année du vol inaugural du New Glenn, lanceur lourd au premier étage réutilisable conçu par Blue Origin, la compagnie spatiale fondée par le milliardaire Jeff Bezos.

Vols habités : ISS, Chine et privés

Les Expéditions de l’ISS

La coopération entre les États-Unis, la Russie, l’Europe, le Japon et le Canada autour de la Station Spatiale Internationale a réussi à survivre aux tourments géopolitiques. La rotation des équipages de 7 astronautes de l’ISS (les Expéditions) continuera donc. Le passage de l’Expédition 70 à 71 se déroulera normalement entre février et mars 2024 via l’habituel ballet de Crew Dragon (4 personnes) et de Soyouz (3 personnes). Les séjours ISS durant environ 6 mois, août et septembre verront une nouvelle relève avec l’arrivée de l’Expédition 72.

 

L’Expédition 70 de la Station Spatiale Internationale.

Premier rang, de gauche à droite : Andreas Mogensen, Jasmin Moghbeli et Loral O’Hara. Derrière : Nikolai Chub, Konstantin Borisov, Oleg Kononenko et Satoshi Furukawa.

Les vols privés

La station accueillera aussi des astronautes venus dans le cadre de vols privés. Au titre de son accord avec la NASA, et en utilisant des capsules Crew Dragon de SpaceX, la firme américaine Axiom Space prépare ainsi pour janvier la mission Ax-3 de 2 semaines commandée par son «astronaute maison» (et ancien de la NASA) Michael Lopez-Alegria avec l’Italien Walter Villadei (armée de l’air italienne), le Turc Alper Gezeravcı (premier astronaute de la Turquie) et le Suédois Marcus Wandt (réserviste de l’ESA).

 Il ne s’agit pas ici de touristes, les places étant payées par les gouvernements italiens, turcs et suédois. Un vol Ax-4, toujours vers l’ISS, est annoncé pour fin 2024.

Une autre initiative privée concerne les vols habités, il s’agit du programme Polaris initié par le milliardaire américain Jared Isaacman. La première mission appelée Polaris Dawn vise désormais le mois d’avril 2024 au plus tôt et emportera 4 personnes (dont Isaacman) autour de la Terre en Crew Dragon de SpaceX. À terme, Polaris ambitionne des vols avec le Starship (quand il sera au point).

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La station spatiale chinoise prise en photo depuis l’orbite terrestre.
© CMSA

La station chinoise

La station spatiale chinoise (récemment prise en photo depuis l’orbite) connaîtra elle aussi une relève régulière de son équipage de trois résidents. Le trio de Shenzhou-17 actuellement à bord cédera ainsi sa place à Shenzhou-18 fin mars. Shenzhou-19 devrait commencer en août.


La station chinoise devait recevoir en 2024 un «compagnon» avec le télescope Xuntian (comparable à Hubble) posté sur une co-orbite permettant des amarrages pour son entretien (une solution originale). Néanmoins, il semble que son lancement ait été décalé à 2025.

La Lune toujours en ligne de mire

Missions robotiques

L’élan vers notre satellite naturel ne faiblira pas avec 2025. Ainsi, l’atterrisseur robotique japonais SLIM (Smart Lander for Investigating Moon) lancé en septembre 2023, doit se poser sur la Lune le 19 janvier prochain.

2024 pourrait aussi voir l’arrivée de plusieurs atterrisseurs automatiques américains (dont Intuitive Machine-1) qui comptent bien se faire une place dans la logique de la NASA de confier au secteur privé des prestations de transport vers la Lune pour y amener des instruments scientifiques, des rovers et plus tard du fret pour les missions habitées.
Toujours dans le robotique lunaire, la Chine mènera normalement en mai Chang’e-6, première mission de retour d’échantillons de la face cachée. L’instrument français DORN de l’IRAP (Institut de Recherche en Astrophysique et Planétologie) sera du voyage.

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L’atterrisseur japonais SLIM sur la Lune (illustration). Son arrivée est prévue en janvier 2024.
© JAXA

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L’équipage d’Artemis II lors de son entraînement récent en Floride. De gauche à droite : Victor Glover, Jeremy Hansen, Christina Koch et Reid Wiseman (commandant).
© NASA

Artemis II fin 2024 ?

Officiellement, les préparatifs pour Artemis II continuent avec novembre 2024 comme créneau affiché par la NASA. Lors de cette mission, 3 hommes (Reid Wiseman, Victor Glover et Jeremy Hansen) et 1 femme (Christina Koch) accompliront un périple habité Terre-Lune aller-retour, le premier du 21ème siècle. Les mois à venir seront décisifs et montreront si tout est prêt pour cette échéance ou si un report s’avère nécessaire.

Mars, Europe et Didymos

Mars fera partie des destinations planétaires de 2024 avec la mission MMX (Martian Moons eXploration) qui associe les agences japonaise (JAXA), française (CNES) et allemande (DLR). Un lanceur japonais H3 doit envoyer une sonde vers la planète rouge (en septembre normalement) pour une arrivée en août 2025. Mise à jour : le décollage a été reporté à 2026.
Un petit rover franco-allemand IDEFIX explorera la lune Phobos de Mars. MMX doit aussi ramener sur Terre des échantillons de Phobos et de Deimos, l’autre petite lune de Mars.
Le mois d’octobre sera marqué par le départ de deux missions importantes. La sonde américaine Europa Clipper quittera la Floride au sommet d’un Falcon Heavy de SpaceX afin d’atteindre sa destination, la lune Europe de Jupiter, en 2030.

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Image d’artiste de la sonde Europa Clipper sur orbite autour de la lune Europe de Jupiter.
© NASA

SpaceX sera aussi à la manœuvre, également depuis la Floride, pour faire décoller la sonde européenne Hera qui vise pour 2026 l’astéroïde Didymos et surtout sa petite lune Dimorphos dont l’orbite fut altérée par l’impacteur DART de la NASA le 26 septembre 2022. Le but est d’étudier en détail les conséquences de cette collision volontaire afin de mieux comprendre comment mettre sur pied une déviation si un astéroïde menaçait notre planète.

Le climat, priorité de fond

Une importante partie des activités spatiales sont cependant tournées vers la Terre, apportant par exemple des capacités inédites de télécommunications ou de géolocalisation. Surtout, le changement climatique constitue un objet d’étude prioritaire pour notre avenir et les satellites montrent depuis plusieurs années à la fois leur précision dans le domaine et leur aspect indispensable. Un grand nombre de variables cruciales à surveiller (niveau des océans, certains relevés de températures, composition de l’atmosphère, etc.) ne peuvent l’être de façon efficace que par des moyens spatiaux.

Note : mise à jour du 11 décembre pour le report du vol inaugural du Vulcan à janvier 2024 et le premier vol Polaris au mois d’avril au plus tôt.

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