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Un beau coup de filet sur orbite

Publié le 27 septembre 2018

Un beau coup de filet sur orbite

Le danger des débris spatiaux, surtout en ce qui concerne l’orbite basse (vers 400 km) où évolue la Station Spatiale Internationale, a connu une spectaculaire mise en scène avec le film Gravity en 2013. Si la catastrophe montrée alors au cinéma reste fort heureusement improbable dans de telles proportions, on craint en revanche que les débris ne finissent par multiplier les pannes de satellites et augmentent au-delà du raisonnable les risques pour les astronautes. Le petit satellite européen RemoveDEBRIS a donc été conçu pour tester plusieurs méthodes qui permettraient à l’avenir de «nettoyer» l’orbite.

Comment se débarrasser des débris ?

RemoveDEBRIS a été pensé pour amorcer une réponse à cette question. C’est une mission au budget modeste (16 millions d’euros) cofinancée par l’Union Européenne dans le cadre de son Seventh Framework Programme ou 7ème programme-cadre pour la recherche et le développement technologique. Fabriqué au Royaume-Uni par Surrey Satellite Technology Ltd, le satellite gros comme une machine à laver (et d’une centaine de kilos) a été envoyé vers la Station Spatiale Internationale à bord d’un cargo automatique Dragon. Il a ensuite été placé sur orbite à partir du module Japonais Kibo au mois de juin dernier. La vidéo ci-dessous résume ces étapes et les objectifs de la mission.

Avant d’aller plus loin, précisons que la Station Spatiale Internationale, en plus d’être un laboratoire scientifique, est aussi une sorte de plateforme de lancement pour petits satellites. Les cargos automatiques amènent en effet ceux-ci qui sont alors pris en charge par les astronautes. Les satellites sont ensuite placés dans un sas spécifique du module Kibo où le bras robotique japonais les saisit afin de les éjecter dans la bonne direction et les envoyer sur orbite.

L’astronaute américain Andrew Feustel à côté de RemoveDEBRIS alors qu’il s’apprête à le faire entrer dans le sas du module Kibo. Crédit : NASA

L’astronaute américain Andrew Feustel à côté de RemoveDEBRIS alors qu’il s’apprête à le faire entrer dans le sas du module Kibo.
Crédit : NASA

RemoveDEBRIS réunit plusieurs partenaires au sein d’un consortium  : Airbus, ArianeGroup et Inria (France), Surrey Satellite Technology Ltd (Royaume-Uni), Innovative Solutions In Space (Pays-Bas), CSEM (Suisse) et Stellenbosch University (Afrique du Sud). Le satellite embarque plusieurs technologies visant à lutter contre les débris : un filet, un harpon, un système de navigation d’approche des objets et enfin une large voile qui augmentera le freinage atmosphérique. Car même sur orbite, là où se trouve l’ISS à environ 400 km d’altitude, le très peu d’air qui subsiste suffit à faire perdre très progressivement de l’altitude aux satellites. L’idée de cette voile est d’accélérer cette chute afin qu’un satellite finisse par se consumer dans notre atmosphère et ainsi éviter qu’il ne devienne un débris ou une source de débris.

Pêche au filet dans l’espace

Mais cette voile constituera l’ultime test de cette mission et empêchera que RemoveDEBRIS ne se transforme lui-même en débris ! La première méthode testée a été celle du filet et c’est un succès. Le 16 septembre, le satellite européen a largué une cible simulant un débris et a tiré en sa direction un filet. La vidéo ci-dessous, acquise par une caméra embarquée, montre la réussite de cette tentative.

RemoveDEBRIS n’a pas été conçu pour nettoyer l’orbite maintenant. Il s’agit ici de tester plusieurs méthodes afin d’en identifier les mérites et (éventuels) défauts respectifs en vue de réfléchir à des missions qui, elles, auront pour but d’éliminer des débris. Certains peuvent en effet entrer en collision avec des engins spatiaux selon des trajectoires qui se traduisent par de très hautes vitesses d’impact (plusieurs milliers à dizaines de milliers de km/h). Les satellites ou les vaisseaux habités sont en quelque sorte «blindés» contre les plus petits tandis que les plus gros sont suivis par radar depuis le sol (des manœuvres d’évitement peuvent du coup être recommandées). Le danger vient de ceux qui sont suffisamment gros pour causer des dégâts tout en étant et trop petits pour être repérés efficacement avant. On estime ainsi qu’il y a plus de 100 millions d’objets de moins de 1 cm sur orbite. Certes, ceux-ci finissent par rentrer dans l’atmosphère terrestre et s’y consumer, mais les activités spatiales en apportent de nouveaux. Outre la recherche sur des solutions de «nettoyage» comme avec RemoveDEBRIS, les agences spatiales et les industriels s’astreignent de plus en plus à une logique de «bonnes pratiques». Cela consiste à concevoir les lanceurs afin qu’ils génèrent le moins de débris possible lors de l’envoi de charges utiles et aussi à prévoir la fin de vie des satellites (par exemple en gardant suffisamment de carburant pour réaliser une ultime manœuvre qui les fera brûler dans l’atmosphère).

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